Pourquoi j’aime tant les jeux

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Le jeu m’a accompagné toute ma vie, j’ai appris à jouer au Tarot à 7 ans en regardant jouer mes frères. Nous jouions beaucoup, Nain jaune, Bonne paye, Tiers monopoly, puis des jeux où il faut un peu plus réfléchir: Catane, Risk, Barbu, Richesses du monde… Et maintenant des petits jeux (Shotten totem, cap’taine carcasse, 7 wonder’s duel…), des jeux de plateaux (Caylus, Discovery, mais aussi Concept, les Chevaliers de la table ronde…).

Pour ce qui est des jeux vidéos, nous avons eu très tôt un ordi, donc nous avions le 1er Civilization, sur disquettes si vous plaît (et tout en anglais), Age of Empire (1, 2 et Mythology), Commando 2, Médieval Total War, Diablo 2 (où je me crée un nouveau perso chaque année)… et plus tard Oblivion, Skyrim, Minecraft, Far Cry 3, Fable, La bataille pour la terre du milieu

Donc j’ai et je joue beaucoup.

Ce qui m’amène à la question récente d’un ami : pourquoi j’aime autant jouer ? Cela m’a fait réfléchir et j’ai dégagé 3 éléments de réponses :

Un espace maîtrisé

Premièrement, les jeux de société ou vidéo ont cette particularité de définir un espace maîtrisé, avec des actions possibles et des conséquences prévisibles. Si j’appuie sur espace, mon personnage va sauter, si je joue mon valet d’atout je vais faire le pli. C’est clair, prévisible et très satisfaisant.

Tout jeu, même le plus complexe, n’est qu’un ensemble de règles permettant d’atteindre un objectif. Nous ne pouvons pas sortir de ces règles, sinon nous jouons à un autre jeu. Tout le monde joue avec les mêmes règles, avec les mêmes chances et avec les mêmes connaissances et souvent avec le même objectif. Et je trouve cela très agréable de pouvoir, pour une fois, anticiper les conséquences de nos actions.

Car la « vraie » vie est chaotique, on ne peut pas prévoir les conséquences de nos actes. Bien sûr on connaît les lois physiques et leurs conséquences : si je saute du 9ᵉ étage, je sais qu’il y a une grande probabilité que l’atterrissage soit mortel. Mais pour tout ce qui est liée aux relations, à la société, à l’avenir, je ne peux pas prévoir avec certitude les conséquences de mes actes, ni les réactions des autres.

Nouvelles compétences

Si le jeu est souvent une porte vers l’évasion (quiconque à joué à Skyrim voit de quoi je parle) c’est aussi un terrain pour l’expérimentation et le gain en compétences dans la « vraie » vie.

Adaptativité

Parmi ces compétences, la première qui me vient est l’adaptivité. En effet, dans tous jeux il y a un objectif à atteindre. Soit donné par le jeu, avoir le plus de points de victoire à la fin, ou par la personne qui joue, pour reprendre l’exemple de Skyrim, la quête principale est bien secondaire par rapport à tout ce que l’univers du jeu propose.

Et dans nos tentatives d’atteindre cet objectif, nous sommes confrontés aux autres ou au jeu, ce qui oblige à changer nos projets, notre façon de jouer. Nous devons nous adapter sans cesse, pour tendre vers l’objectif malgré les contraintes. En regardant des pros jouaient à Age of Empire, j’ai été frappé par leur capacité à s’adapter en permanence à ce que jouent les autres, tentant d’anticiper la stratégie adverse et rectifiant à chaque instant leur propre jeu pour tenter de gagner.

Et dans notre monde en changement perpétuel, nous avons besoin d’apprendre à nous adapter, à changer notre vision, nos projets. Non pas pour le plaisir de tout transformer à chaque fois, mais pour évoluer en même temps que le monde qui nous entoure. Je pense en particulier à nos vies d’Église qui ont souvent plusieurs mises à jour de retard. La foi chrétienne doit s’incarner dans l’aujourd’hui de nos vies et cela demande de nous adapter à ce monde.

Créativité

Certains jeux, permettent une très grande créativité dans un ensemble de règles claires. Je parle par exemple de la liberté totale dans les jeux bacs à sable dont Minecraft est le meilleur représentant. Combien d’heures ai-je passé à creuser, empiler des cubes pour refaire Erebor, Edoras ? Dans ce cadre précis fixé par le jeu, il est possible de construire ce que l’on veut, on peut laisser libre cours à notre imagination, essayer, détruire, refaire, revenir dessus des jours plus tard et recommencer. Et sans problème de hausse des prix des matériaux.

Et cette créativité développée dans les jeux, s’exprime dans ma « vraie » vie, elle me permet de chercher des solutions neuves, de proposer des regards différents. Elle me dit aussi que l’échec est possible, qu’il vaut mieux essayer que de ne rien faire, mais aussi que tout est appelé à évoluer, que les solutions d’un moment sont appelées à être remises en causes. Qu’il faut sans cesse faire preuve de créativité, la partie n’est jamais terminée.

Attention, écoute et travail en équipe

Ces dernières années, les jeux de sociétés coopératifs sont de plus en plus nombreux et je m’en réjouis. Car dans ce cas, il s’agit non de gagner contre les autres, mais bien gagner avec les autres contre le jeu. Et ces jeux m’ont fait, et me font gagner, en compétences sociales, en particulier l’attention à l’autre, l’écoute de ses avis et le plaisir du travail en équipe.

Nous avons le même objectif, chacun et chacune participe à l’atteindre et nous avons besoin de tout le monde. Pour cela il faut écouter toutes les idées, laisser la parole, être attentif à ce que tout le monde participe, puisse proposer son avis, sa tactique et il faut discuter, prendre des décisions, être sûr que chacun et chacune ait compris son rôle, ce qu’il peut faire. Le jeu de rôle est le parfait exemple de ce travail en équipe qui ne peut se passer d’écoute, de discussion et de prise de décision en commun.

Et ces compétences sont primordiales dans la vie, elles sont nécessaires au travail, en famille, dans les associations, en Église. Le jeu a contribué à me découvrir l’importance du travail en équipe, la richesse des avis des autres, la nécessité de prendre des décisions ensemble et d’en être solidaire.

Empathie

La dernière compétence dont j’ai pris conscience est l’empathie. Car lorsque l’on joue contre les autres, ils restent des êtres humains avec leurs émotions. Et si l’objectif est de gagner, j’ai découvert que cela ne peut pas se faire au détriment des émotions des autres. Cela ne veut pas dire qu’il faille les laisser gagner, sinon le jeu perdrait son intérêt, mais de ne pas les enfoncer plus. Je pense par exemple aux Aventuriers du rail, où il est possible de bloquer les adversaires, juste pour les gêner, car cela ne contribue pas directement à la réalisation de mes objectifs. Pour moi dans ce cas, je ne gagne pas, je fais perdre l’autre. Et je trouve que la nuance est grande.

Et comme le jeu c’est la « vraie » vie, avec ses émotions, ses espoirs, ses rancœurs des fois, il est important de prendre en compte l’humanité des adversaires. Et d’être un peu empathique. Cela passe en particulier dans la victoire modeste et la défaite heureuse. J’aime bien raconter cette histoire : une de mes plus belles parties d’échec, c’était une défaite, car mon adversaire était une jeune fille de 5ᵉ, contre qui j’avais toujours gagné et qui a joué parfaitement bien. C’était une partie très belle, équilibrée et son mat était très beau. Donc je me réjouis d’avoir perdu cette partie, je l’ai félicitée et elle était très fière d’avoir gagné.

Donc oui, les jeux m’enseignent l’empathie, l’attention aux autres dans leurs émotions, dans leurs attentes, dans leur identité.

Apprendre de nouvelles règles

Pour finir, le jeu m’apprend à comprendre de nouvelles règles du jeu de la « vraie » vie :

  • Mes propres règles du jeu, d’abord. Cela me permet de comprendre comment je fonctionne, ce qui est important pour moi. Par exemple mon besoin d’encadrer l’inconnu, le hasard ou ma frustration devant les situations injustes.

  • Celles des gens que je côtoie, que je croise. Chacun et chacune, de par leur vécu, leurs expériences vivent avec des règles différentes des miennes. Et il est bon de prendre cette différence en compte. Certains comportements, certaines réactions découlent seulement de règles qui ne sont pas les miennes et que je ne perçois pas.

  • Celles de la société, avec le complexe fonctionnement des relations humaines, des institutions, des enjeux et des pouvoirs. Le jeu permet de modéliser, plus ou moins finement, les rouages du monde, certains phénomènes. Il suffit de jouer à un jeu de placement d’ouvriers pour comprendre les effets néfastes d’un monopole.

  • Celles de Dieu. En effet, j’aime regarder l’enseignement de la Bible comme des règles du jeu. Dieu nous dit : « Voilà comment tu peux jouer ta vie ! » À la différence qu’il nous laisse libre de jouer ou non suivant ses règles. Elles sont faciles à énoncer : « aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimé » (Jean 13, 34), « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée ; et ton prochain comme toi-même. » (Matthieu 22, 37), mais il faut toute une vie pour les maîtriser.

Pour conclure

Ainsi, le jeu a une part importante dans ma vie. Il me permet de regarder différemment un sujet, il me permet d’expérimenter, de faire preuve de créativité, il m’ouvre à d’autres horizons, il me fait gagner en compétences sociales et il me rend attentif aux règles de ce monde.

J’espère jouer encore longtemps !

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